Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
31 janvier 2018 3 31 /01 /janvier /2018 20:07

Un article passionnant sur les trajectoires scolaires des filles et des garçons, dans la société du XIXème siècle (mais le 20ième en a été la continuité, pour les classes ouvrières, au moins jusque dans les années 80), avec une priorité accordée à la carrière scolaire des garçons, et celle, pratique, des filles, mais aussi une explication plus large des choix parentaux, et une très intéressante investigation sur la transmission transversale des savoirs au sein des fratries, entre frères et sœurs, des frères aux sœurs, des frères comme modèles, aux sœurs  (ou j'ai envie d'ajouter à défaut par l'intermédiaire de "pères", admirés pour leur savoir et pour l'action, pour la dynamique dans laquelle ils évoluent, comme si tous les individus privilégiés sur ce terrain, de sexe masculin, représentait pour les filles quelque chose "du père", de sa liberté, ce souffle qui leur manque)  

http://journals.openedition.org/genrehistoire/2845

 

 

Partager cet article
Repost0
28 janvier 2018 7 28 /01 /janvier /2018 10:42

ELLE. Avez-vous entendu parler de ce film ou l'avez-vous vu ? Qu'en avez-vous pensé ?

J'ai été assez "choquée", non pas par le film, mais par certaines critiques que j'ai pu lire, qui ont été jusqu'à dénigrer la comédienne Isabelle Huppert pour avoir accepté de jouer le rôle.

Alors, hier soir, j'ai regardé le film, et voilà ce que j'ai vu :

 

C'est donc l'histoire d'une femme qui enfant, à 10 ans, a été découverte avec son père, alors qu'il venait de commettre un crime et que d'autres crimes ont été découverts. Son père était un sérial killer. On comprend cela non pas au début du film, mais un peu plus tard dans celui-ci.


ELLE devient femme, et entrepreneuse dans les jeux vidéos. C'est une femme de pouvoir, mais qui n'est pas odieuse. ELLE sait dire non, ELLE sait dire oui, ELLE n'a pas sa langue dans sa poche, ne se laisse pas faire, ou se laisse faire, selon son bon vouloir.


ELLE subit un premier viol à son domicile. ELLE se défend de toutes ses forces, puis lorsque le violeur s'échappe, ELLE réagit froidement. ELLE se relève, prend un bain, ramasse la vaisselle cassée... consulte un médecin pour une prise de sang... et continue à vivre.


ELLE est prudente, mais dépasse à sa manière la violence qu'elle vient de subir.. Quelques temps plus tard, ELLE subit un second viol, tout aussi violent, toujours à son domicile (Bien qu'elle avait fait changer toutes ses serrures). Même réaction. 


ELLE l'annonce un soir à ses amis qui la regarde, ébahis par son sang froid.
ELLE ne veut pas entendre parler de la police, de plainte, etc.... D'autant plus que 'affaire de son père est à nouveau dans le fil de l'actualité (pour une histoire de remise de peine, car il est vieux et malade). ELLE ne veut pas revivre ce qu'elle a vécu enfant. ELLE s'est forgée une manière d'être, de vivre les choses. ELLE n'a pas envie non plus de repasser à la télé. ELLE est déjà régulièrement agressée dans sa vie du fait du stigmate du père assassin.


ELLE ne veut pas se laisser déstabiliser par la peur. ELLE a appris à vivre avec l'agression, et à faire en sorte que celle-ci ne l'atteigne plus, ne l’empêche plus de vivre. 


ELLE subit un troisième viol. ELLE ne se laisse toujours pas faire, mais en luttant découvre le visage de son agresseur, qui est un voisin (marié avec une femme très belle, et catholique pratiquante) par qui ELLE était attirée et qu'elle a "dragué" lors d'une soirée (entre voisins). Dans sa lutte, ELLE lui plante un ciseau dans la main et parvient à le faire fuir.


Le film continue, sur la vie quotidienne de cette femme. Cette femme qui vit, et qui n'investit pas le rôle attendu par la société.  Victime de faits, sans investissement d'un rôle. Je ne veux pas dire que c'est toujours le cas, que des victimes de faits ne souffrent pas parfois de manière extrême et sur du long terme, mais seulement qu'il y a cette dimension injonctionnelle de rôle souffrant qui devrait nécessairement nous empêcher de continuer à vivre. 


Un peu plus tard ELLE est invitée chez ce voisin à venir manger des lasagnes avec son fils. ELLE semble mettre de côté le fait que ce voisin l'ait violée plusieurs fois. ELLE ne cède pas à la terreur, au stigmate, ELLE voit aussi son voisin comme un homme, et un homme qui l'attire, en dehors du violeur. ELLE sait qu'elle prend un risque, mais lui donne une chance. ELLE donne un chance à l'homme. ELLE y va, et alors que son fils s'endort il lui propose de descendre à la cave pour lui montrer son système de chauffage (car elle lui fait remarquer en enlevant ses chaussures et en buvant un cognac dans le salon que le sol est chaud). Il la saisit et va la violer mais ELLE le regarde et lui dit que ce n'est pas nécessaire. ELLE pense qu'il ne la violera pas, mais il lui répond qu'il ne peut pas autrement. (C'est comme si le viol lui permettait d'échapper à la culpabilité de l'adultère, tout en répondant à son désir). Alors elle se laisse battre, et « prendre » violemment. Et ELLE jouit. C'est une sorte de «demi jeu » sado masochiste où se mêlent le désir et le risque pour ELLE, mais aussi pour lui.. 


Un peu plus tard, la mère de ELLE (je ne sais plus comment elle se prénome... ni même si on le sait dans le film... étrange !) décède, mais lui demande juste avant de mourir d'aller voir son père en prison. ELLE ira. Pour « lui cracher au visage » dit-elle. Mais juste après avoir appris que sa fille venait le voir, son père se pend (du moins, cela est supposé, il est retrouvé mort dans sa cellule, se serait pendu avec un drap).

C'est peut-être un élément déclencheur d'un changement de « perspective » pour ELLE. Mais ce n'est qu'une supposition personnelle.

Un peu plus tard, ELLE a un accident de voiture, et tente de contacter deux personnes mais tombe sur leur répondeur. Alors elle appelle l'agresseur, qui est aussi son voisin, un voisin dont ELLE n'a toujours pas peur (ELLE dit "avoir l'habitude avec les fous" à un moment donné dans le film. Et puis, pour rappel, elle voit son voisin d'abord comme un homme, avec son autre visage, qu'elle apprécie). Il vient la chercher, la dégage de la voiture, et la ramène chez elle. Il la soigne. Il est alors très doux. Comme apaisé.. ELLE lui demande « pourquoi ». « Pourquoi » son comportement. Elle lui demande si c'était bon ? Il ne répond pas.

A la fin du film, ELLE avoue à l'une de ses collègues qu'ELLE avait une liaison avec son mari depuis quelques mois mais que c'est finit (sa collègue et amie lui avait dit se douter qu''il avait une liaison). Elle dit qu'elle a finit de mentir. Qu'ELLE ne veut plus mentir.

Lors de la même soirée, ELLE se fait raccompagner par l'homme qui l'a agressée plusieurs fois. En route, ELLE lui dit que c'est un « jeu malsain" (ELLE discerne), et que c'est terminé. ELLE lui demande s'il se rend compte de ce qu'il lui a fait subir, et lui dit qu'ELLE va tout dire à la police, pour ELLE, mais aussi peut-être pour d'autres. Combien d'autres ? Lui demande-t-ELLE ?
Arrivé chez elle, ELLE entre et refuse toujours de se laisser déstabiliser par la peur. mais il la suit et se jette sur ELLE. Il est toujours masqué. Elle se défend, il la bat  ...Son fils (ELLE a un fils d'une vingtaine d'année) arrive et le frappe à la tête. S'en est finit.

 

Conclusion :

 

Ce film qui a été décrié par certaines féministes comme honteux, faisant l' « apologie du viol » et/ou promouvant la « culture » du viol, ou encore le banalisant, n'a à mon sens rien à voir avec ce pourquoi il a été accusé. Isabelle Huppert est excellente dans un rôle très dur, qui montre, d'après moi, l'impact de la violence dans l'enfance, mais aussi la transformation que cela peut avoir dans nos manières d'être et nos manières de réagir face à la violence. Transformation qui n'est pas forcément pathologique. ELLE n'est pas "pathologique". ELLE n'entre juste  pas dans le moule du rôle de la victime attendue par la société.  Ce film montre aussi, je crois, ou l'on peut le voir comme cela, ce que dénouent certaines pertes qui sont liées à nos histoires, et l'impact de ce que je crois être de l'ordre de la répression sur la sexualité,et sur ses normes,  qui peuvent la rendre criminelle. Ce film montre la complexité et la pluralité des situations et comportements. Il montre également une femme d'action, qui peut exprimer son désir dans l'action, où la raison a toute sa place au sein de la "cité". Ce qui lui donne la possibilité de vivre plus sereinement sa sexualité.
Du côté des spectateurs/trices, les différentes opinions qu'on a pu lire montrent les attentes divergentes que l'on peut avoir du cinéma, et que ces attentes déclenchent des réactions qui à mon avis parfois s'y arrêtent un peu trop.
Pour ceux et celles qui ont vu le chef d'oeuvre "scènes de la vie conjugale" de Bergman, est-ce qu'un jour on va le trouver scandaleux et pitoyable, en disant qu'il banalise la violence conjugale ?

Partager cet article
Repost0
27 janvier 2018 6 27 /01 /janvier /2018 13:15

Je n en veux pas au féminisme. Loin de là. Je suis pro féminisme. Mais parfois ça m énerve parce que je sais pas comment vivre, moi, avec tout ce que je peux lire sur les rapports de genres. Difficile parfois de prendre du recul entre ce qu on comprend et ce qu on vit. Difficile de se laisser vivre, de composer avec tout ça, de choisir ce qu on prend et ce qu on laisse dans sa propre vie. De prendre du recul face à ses propres contradictions. 

Je crois qu'il est possible de sortir d'un schéma du désir d'action de soi, prit dans celui des hommes, dans la mesure où l'on prend conscience de la manière dont on fonctionne. Ou plutôt de l'interrogation de notre manière de fonctionner. En cela, les discours féministes sont une ressource à partir de laquelle on peut s'interroger. 

Peut-être faut-il pouvoir aussi se déculpabiliser de ses contradictions. Etre moins dure avec soi-même... pour pouvoir s'autoriser des pratiques de soi, pour pouvoir s'autoriser tout simplement à vivre, à essayer dans cet imbroglio de volonté d'émancipation individuelles et collectives, et de nécessité de vivre ensembles, à essayer de se frayer un chemin qui ne nuise ni à soi, dans sa vie, ni au progrès en faveur de l'égalité des sexes. 

Partager cet article
Repost0
23 janvier 2018 2 23 /01 /janvier /2018 23:07

Comment trouver un équilibre, donc, entre les discours et les pratiques de soi ?

On peut se trouver totalement en désaccord avec ce que l'on défend. Je ne vois pas comment il est possible de vivre sereinement quand on part du principe premier de ne pas être dominée pour pouvoir agir, quand on est une femme, car  la domination masculine est partout. Et elle se croise avec des dominations économiques, qui créent des injustices sociales, qui produisent maintes frustrations qui produisent encore plus de rapports de pouvoir. 

Dans la sexualité, c'est pire. Mais c'est aussi par là que peut-être il est possible de commencer à se ressaisir de soi. Parce les rapports de sexe sont partout aussi. Pour ma part, avec mon parcours qui s'ajoute à tout cela, le problème qui se pose aujourd'hui est que je ne vois pas comment vivre une sexualité en tant que femme sans être en contradiction avec le souhait de ne plus être dans des rapports de domination. 

D'une part, parce qu'en voulant cela, on peut soi-même vouloir tout maîtriser. Et ça ne peut pas marcher. Partant de cette impression que les hommes veulent de toute façon dominer, impression qui peut progressivement s'imposer à soi, on peut se retrouver à chaque début de relations à vouloir tout maîtriser.  D'autre part, parce que structurellement on peut paradoxalement aimer les rapports de domination pour les combattre. Donc, on peut également se retrouver dans des relations qui produisent une forme de mise en marche du désir. Car quand on lutte, on est dans l'action. Mais on est aussi dans le conflit. Même lorsque l'on se soumet dans un premier temps, on se retourne, et la lutte devient un va et vient permanent de recherche de la maîtrise.

Quand on est structurée dès le départ dans un assujettissement total, on cherche, ou on peut chercher une délivrance en entrant dans des relations où l'on est au départ assujettie, parce que cela nourrit notre désir, et notre jouissance. On résiste pour jouir. Il y a ce nœud, ce point de tension qui parce que l'on est tenue, nous permet de résister, et dans cette résistance nous jouissons. Nous nous y autorisons parce que nous résistons. Mais pour résister, il faut être attachée. Attachée symboliquement (combien fantasme d'être attachée pour jouir ?), au moins. Cette symbolique de l'attachement-résistance se transfère dans les affects. On s'attache à quelqu'un qui nous domine, nous assujetti parfois de manière extrême, mais on ne peut pas le quitter, parce que c'est ce qui nous permet de résister et de jouir. De jouir plus fort. Et c'est aussi une manière de chercher à se libérer. De sentir une restitution de soi, et une forme d'expression du désir dans l'action. 

Les hommes sont dans l'action, et nous, les femmes, ou certaines femmes, peut-être la plupart, peut-être certaines plus que d'autres, notre désir d'action au même titre que les hommes (ou que les garçons, puisque la construction se fait dans l'enfance) a été condamné, et inhibé. Nous le cherchons au travers de relations avec des hommes d'action. Et les plus forts nous paraissent les plus dominateurs, car nous n'avons pas cette force. Nous la cherchons dans la relation, mais ce désir inhibé ne peut que se glisser dans la relation comme une forme d'impensé qui cherche sa place. 

Ce serait donc l'inhibition du désir qui, parfois, nous conduit à nous soumettre, pour vivre indirectement notre désir, et qui fait que nous acceptons l'action .... qui reste. Et qui fait que nous ne sommes pas des sujets à part entière, mais des sujets dépendants, et subalternes.

Mais certaines femmes parviennent à dépasser cette dépendance. Y compris en passant par ce chemin. Et curieusement, il semble que ce ne soit possible qu'au travers de relations où il y a sexualité. 

Si les hommes dominent, ce n'est peut-être pas toujours parce qu'ils le veulent, mais parce que leur construction fait souvent d'eux des êtres plus forts que nous, les femmes. Mais c'est aussi cela la domination masculine. 

 

Partager cet article
Repost0